Les notions de « péché » dans le christianisme et l’islam diffèrent. L’auteur de cet article les compare pour en faire ressortir les similitudes et les différences.
Les différences
Deux conceptions de l’homme
Selon la Bible, tous les êtres humains ont hérité d’Adam une nature pécheresse. « Le cœur de l’homme est porté au mal dès son enfance » déclare Dieu en Genèse 8:2. Par contre, dans le Coran, la notion de péché originel est absente. En créant l’homme, Dieu lui a conféré un état d’innocence, une nature encline au bien, la fitrah. L’homme est fondamentalement bon, mais faible (Sourate 4:28 ; 30:30 ; 31:13).
Deux conceptions de l’origine du péché
Dans le christianisme, le péché a sa source dans le cœur de l’homme (voir le « Sermon sur la montagne », Matthieu 5), tandis qu’en islam, c’est l’acte qu’une personne commet ou pas qui détermine si elle a péché.
Deux manières de décider si une personne a péché
Dans la Bible, c’est l’amour « don de soi » pour Dieu et le prochain, ou son absence, qui détermine si une personne a péché (voir Galates 5:22 et 1 Corinthiens 13). Dans le Coran, c’est le non respect des prescriptions d’Allah qui constitue un péché. En résumé, le christianisme considère le refus d’aimer comme péché tandis que pour l’islam, c’est la désobéissance aux prescriptions d’Allah qui est coupable.
De ces différences théologiques et anthropologiques découlent deux solutions complètement différentes pour résoudre le problème du péché.
Deux conceptions du salut
Pour le christianisme, les êtres humains ont besoin d’un rédempteur. Dans l’islam, cette notion n’est jamais mentionnée parce qu’il exclue la possibilité qu’une personne rachète les péchés d’une autre. Chaque être humain doit répondre de ses propres fautes.
En raison de son penchant naturel pour le péché, l’homme a besoin d’un renouvellement complet de son être intérieur. La Bible parle à cet égard de la nécessité d’une « nouvelle naissance ». En islam, l’homme n’a besoin que d’être guidé par sa nature qui, s’il lui arrive d’être faible, est fondamentalement bonne.
Dans le christianisme, le croyant peut avoir l’assurance de son salut. En islam, non. Tous ceux que Christ a rachetés de leurs péchés font de bonnes œuvres parce qu’ils sont sauvés. Les musulmans, eux, en accomplissent dans l’espoir de mériter le paradis.
Voir aussi Les différents types de péchés (catéchisme de Heidelberg)
Les similitudes
Après avoir établi les différences, voyons les ressemblances.
D’abord, le Coran et la Bible (Exode 10:1-2) s’accordent à dire que Dieu a accompagné son alliance de commandements (Sourate 5:7 ; 5:10). Par conséquent, Bible et Coran considèrent le péché comme la rupture d’une relation (Esaïe 59:2 ; Sourate 10:15-16 ; 7:77 ; 7:175).
Ensuite, cette alliance ayant fait l’objet d’une révélation (3:81 ; 5:47), pécher revient à faire acte d’incrédulité (3:86).
Enfin, si l’alliance constitue la base de la loi, le péché équivaut à violer la loi (Josué 7:11 ; 1Timothée 1:9 ; Sourate 2:229).
Ayant comparé le concept de péché et de rédemption dans le Coran et la Bible, nous devons conclure que ces deux livres comprennent le péché de manière assez semblable mais qu’ils préconisent des solutions très différentes pour en libérer l’homme.
La différence fondamentale
Le péché comme cause de la mort de l’homme
Du point de vue biblique, le « péché » est un problème grave, puisque Dieu déteste le péché. Il est si grave qu’il rompt la relation entre Dieu et l’homme (Ésaïe 59:2 ; Proverbes 15:29) et entraîne sa mort spirituelle (Romains 6:23). C’est la raison pour laquelle la Bible ne parle pas de péchés graves ou légers. Dans le « Sermon sur la montagne », Jésus présente une conception radicale du péché qui ne s’arrête pas aux actes commis mais englobe les pensées. Ne pas satisfaire aux normes d’amour de Dieu signifie pécher (hamartia : « contourner le but »). Ne pas aimer son frère est péché (1Jean 3:7-10). L’homme a donc besoin qu’un rédempteur le libère de l’esclavage du péché.
Le péché comme signe de la faiblesse de l’homme
L’islam évalue les actes en fonction de leur caractère « strictement interdits » (haram), « réprouvés », « recommandés » ou « obligatoires ». Les péchés varient donc en gravité.
Dans la tradition musulmane, tous les actes sont pesés sur une balance. Certains sont considérés comme méritoires, d’autres comme réprouvés. De son côté, l’islam populaire, à la différence de l’islam orthodoxe, a le concept d’actions compensatrices pour les péchés.
On le voit, le Coran, la charia et la tradition musulmane prescrivent des façons différentes de « régler » la dette du péché. Mais le principe général reste le même pour les trois : chaque personne doit accumuler des mérites auprès de Dieu pour espérer gagner le paradis.